Lettres au Sénégal

La vie n’est pas toujours tendre certes.

Tu peux percuter le sol sans comprendre.

La vie peut malgré tout se montrer généreuse…

Quand vient l’heure des choix, des mains tendues, des rencontres, des découvertes…

 

Ce soir, mon avion n’est plus qu’à quelques centaines de mètres au-dessus de l’océan.

Il descend.

A peine quelques minutes pour se trouver plus bas…

Je retiens ma respiration comme chaque fois, comme si cela allait amortir le contact avec l’asphalte.

Je brûle d’impatience de quitter cet oiseau de fer.

Trois, deux, un…

Ca y est ! Je suis dehors ! Je foule à présent la terre africaine.

Je sens cette douce chaleur du soir m’envelopper tel un peignoir doux en hiver.

Je suis désormais une « Toubab » pour quelques jours sur cette terre d’accueil.

Le dépaysement est absolu.

Dans la nuit noire, à bord d’une vieille voiture, je parcours la route à destination de la case qui m’abritera le temps de mon séjour.

Cher Sénégal,

Ce premier soir, tu me laisses déjà un souvenir marqué.

D’abord d’inquiétudes…

Ensuite, très vite, de ta plus belle facette, celle qui te caractérise : l’hospitalité de tes habitants.

Je ne le saurai qu’après quelques jours seulement que tu t’apprêtes à marquer ma vie à jamais.

Sur cette terre, je n’ai crainte.

Si tu es malade, les gens te visitent. Si tu as peur, ils te rassurent. Si tu es triste, ils te consolent. Si tu ris, ils rient avec toi. Si tu te perds, ils te montrent le chemin. Si tu as des projets, ils t’encouragent…

Cher Sénégal,

Malgré ces lits d’ordures éparpillées sur ta terre rouge et ocre et sur ton sable à la couleur parfois douteuse, tu laisses ton empreinte dans les cœurs les plus sensibles.

Tes femmes sont belles et élégantes.

Leur port de tête est si impeccable qu’il est impossible de les quitter des yeux tout au long de leur élégante marche.

Le Sénégal, le vrai Sénégal, c’est aussi et surtout ces villages où chaque famille construit un mur sur sa parcelle de terrain.

Ce sont ces enfants dont s’occupe tout le village qui marchent nus pieds dans le sable. Ce sont ces gens heureux de vivre.

Ce sont ces sourires qui réchauffent.

Mais aussi…, ce sont ces enfants qui s’accrochent aux fenêtres de ta voiture. Ces enfants qui te percent de leur regard vide et affolant. J’ai senti dans ces moments monter l’insupportable. Quelle impuissance face à ces gamins exploités qui avaient vite fait de rendre à leur « maître » la monnaie glissée dans leur main.

Cher Sénégal

Mes tripes se sont tordues chaque fois que j’ai croisé une charrette tirée par un âne ou un cheval affamé. Mon cœur s’est noué à chaque coup de cravache sur leur peau blessée. Ma bouche a crié sur un propriétaire maltraitant son âne sous mes yeux effarés.

Malgré ces versants parfois durs, j’ai aussi vibré au rythme de cette richesse impalpable que m’ont transmis tes habitants à la peau tendre chocolat, ces hommes, ces femmes et ces enfants pourtant généreux du cœur.

Telle la poussière de sable qui vole et s’incruste dans les plus petits recoins, tu as pénétré et marqué mon cœur.

Du fond de mes tripes, je te remercie immensément.

A vite.

Hélène, le 08 mars 2020

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